Image symbolisant les différentes sources de financement en capital-risque, avec au centre une rose des vents pour indiquer la direction et les options disponibles pour les startups et les investisseurs
Les essentiels

Les différents types de financement et leur impact sur la table de capitalisation

Avant d’explorer les différentes options de financement, il est essentiel de comprendre le rôle et l’importance de la table de capitalisation. Vous trouverez une introduction à ce sujet dans l’article Table de capitalisation : en quoi son suivi est un enjeu ?

Une startup mobilise de nombreuses ressources pour se développer : temps, argent, expertise, force de travail, visibilité… Plus elle en dispose, plus elle maximise ses chances d’atteindre ses objectifs. Parmi ces ressources, une se révèle essentielle : le financement. Pourquoi ? Parce qu’il peut se substituer aux autres et pallier tout déséquilibre.

Certaines startups parviennent à démarrer en mode bootstrap, c’est-à-dire sans faire appel à des capitaux propres externes. Mais c’est un luxe que peu de fondateurs peuvent se permettre, faute de fonds personnels ou de capacité à monétiser leur solution suffisamment vite et fort. Les financements externes deviennent alors un enjeu clé.

Selon la nature du besoin, les acteurs sollicités diffèrent : business angels, fonds d’amorçage, fonds de capital-risque, banques, acteurs publics, plateformes de crowdfunding, etc. On peut aussi classer ces acteurs selon le type de financement qu’ils proposent :

  • financements dilutifs (avec impact direct sur le capital),
  • financements non dilutifs (sans impact sur la table de capitalisation),
  • financements hybrides (à mi-chemin entre les deux).

Explorons ensemble ces trois catégories, leur logique et leur influence sur la répartition du capital. La finance est parfois surprenante… vous y découvrirez peut-être dans cet article des outils que vous n’utilisez pas encore.

Le financement dilutif

Le financement dilutif correspond à l’apport de capitaux propres : une somme injectée dans l’entreprise contre des parts de capital. L’investisseur devient copropriétaire, et peut prétendre à une part des bénéfices futurs. En contrepartie, la détention relative des fondateurs et des autres actionnaires se réduit : c’est ce qu’on appelle l’effet dilutif. Cette opération s’apparente à une vente d’un pourcentage de détention par les actionnaires existants au profit d’un nouvel entrant.

Les points de négociation portent sur :

  • l’actif cédé par les actionnaires (i.e. l’entreprise elle-même). Le dirigeant, le fondateur et/ou les actionnaires devront répondre à ces questions :
    • Quels sont les actifs de l’entreprise (i.e. le produit, l’équipe, la marque, le portefeuille clients, les contrats en cours, etc.) ?
    • Quelle est sa position sur son marché ?
    • Grâce à ses actifs, quelle est sa capacité à défendre ses parts de marché, voire à s’accroître ?
    • Quels sont les risques endogènes et exogènes (e.g. opérationnels, structurels, géopolitiques, humains, technologiques, etc.) ?
  • l’apport en new money de l’investisseur
    • le montant de l’apport,
    • le nombre de parts de capital cédées ;
  • les garanties et droits spécifiques demandés par le potentiel investisseur, comme :

Le fondateur ou dirigeant a donc pour rôle « d’habiller la mariée », c’est-à-dire rendre son entreprise aussi séduisante que possible. Comment faire ? … Cela passe par :

  • un storytelling convaincant : les investisseurs achètent de belles histoires. Ils veulent comprendre la genèse du projet et ce qui anime les fondateurs ;
  • une équipe solide : un beau projet n’est rien sans une équipe de choc en mesure de relever tous les défis ;
  • des réalisations concrètes : à défaut de succès entrepreneuriaux passés, il faut démontrer sa capacité d’exécution afin de rassurer quant à l’atteinte de jalons futurs ;
  • des projections financières cohérentes ;
  • des alternatives crédibles, si le financement n’est pas obtenu.

Bien qu’il soit impossible d’anticiper l’alignement des planètes, le chef d’entreprise doit lever au bon moment. Ceci veut dire profiter d’un succès récent, d’un marché porteur ou d’un signal positif pour l’entreprise. Ce momentum crée un rapport de force plus équilibré, des négociations plus fluides et une valorisation plus avantageuse. À l’inverse, si cette fenêtre se referme, les discussions peuvent devenir plus longues, plus complexes, et nettement moins favorables pour le fondateur.

Le financement non dilutif

Le financement non dilutif vise à obtenir des ressources financières sans modifier la répartition du capital. En France, il peut prendre la forme de :

  • prêts bancaires (parfois garantis par des dispositifs publics) ;
  • prêts d’honneur (octroyés aux fondateurs à titre personnel) ;
  • subventions (émanant d’organismes publics comme les régions, Bpifrance, ou l’Union européenne pour encourager l’innovation ou la création d’emplois) ;
  • crédits d’impôt et exonérations de charges (comme le CIR ou le statut JEI).

Avantages

  • la structure actionnariale et de gouvernance est préservée ;
  • les fonds sont généralement obtenus plus rapidement.

Inconvénients

  • le remboursement du capital et des intérêts pèsera négativement sur la trésorerie ;
  • les conditions d’obtention (garanties, critères d’éligibilité) peuvent parfois être strictes.

Même si ces financements ne diluent pas le capital, ils ont un effet indirect : en cas de revente, si les fonds ont permis de créer de la valeur, les actionnaires en profitent. Sinon, la dette pèsera sur la valorisation, réduisant mécaniquement la part des capitaux propres… et donc le montant redistribué aux actionnaires. Il arrive aussi, pour les jeunes entreprises, que le prêteur exige du fondateur qu’il se porte caution personnelle. Sa responsabilité n’est donc plus limitée à son apport. Il peut perdre gros !

En règle générale, dans l’univers des startups, les financements non dilutifs ne peuvent se faire sans un niveau de fonds propres conséquent ou la finalisation d’une levée de fonds. C’est un complément à l’apport de capitaux propres. En effet, les banques et autres acteurs du non dilutifs ne sont pas là pour financer l’hypercroissance du projet mais pour contribuer à l’amélioration de sa solvabilité, raison pour laquelle ils conditionnent leur prêt à :

  • l’entrée au capital d’investisseurs (crédibilisant la startup) ;
  • la couverture par ces investisseurs du risque de défaut à court-terme ;
  • la génération de chiffre d’affaires (le multiple de MRR définissant souvent la somme prêtée).

Le financement hybride : obligations convertibles et BSA-AIR

Les instruments hybrides sont un compromis entre dilutif et non dilutif. Ils se matérialisent par une somme d’argent mis à disposition de l’entreprise et convertible à terme en actions, selon certains critères. Les obligations convertibles et les BSA-AIR (bons de souscription d’actions - accord d’investissement rapide) sont des instruments qui ont cette double caractéristique. Ces deux outils sont très semblables mais diffèrent sur les points suivants :

  • les obligations convertibles génèrent des intérêts, pas les BSA-AIR ;
  • en cas de cession, les obligations convertibles non converties se font rembourser avant que les actionnaires et détenteurs de BSA-AIR ne récupèrent le moindre euro. On les dit seniors au capital ;
  • les BSA-AIR n’ont pas vocation à être remboursés en numéraire ;
  • les BSA-AIR peuvent, en théorie, ne pas avoir de date d’échéance butoir de conversion.

Au carrefour des capitaux propres et de l’emprunt, les BSA-AIR sont plus proches du financement dilutif que ne le sont les obligations convertibles.

Du fait de ce caractère hybride, ces deux outils sont traités distinctement des actions dans une table de capitalisation. Ils apparaissent dans la section vision diluée.

Zoomons sur un outil qui se développe beaucoup : les BSA-AIR.

Principaux paramètres du BSA-AIR

  • montant investi ;
  • valeurs plafond et plancher des capitaux propres (en anglais cap et floor) ;
  • taux de décote.

Avantages par rapport au dilutif

  • pas de dilution immédiate, la conversion en action se faisant ultérieurement ;
  • simplification des négociations initiales : la valorisation n’a pas besoin d’être fixée au moment de la négociation ;
  • pas d’intérêts à rembourser ;
  • considéré comme quasi-fonds propres dès le décaissement.

Inconvénients

  • complexité juridique et comptable ;
  • incertitude quant à la valorisation future ;
  • risque de dilution potentiellement important si le plafond de valorisation (valuation cap) s’avère être bas.

Il est vivement recommandé de se faire accompagner par un expert pour structurer ce type de produit et de s’équiper d’outils de suivis comme Logo Alqui Alqui pour comprendre l’impact sur la distribution de valeur entre les différentes parties prenantes.

Les bons de souscription : un financement alternatif à impact différé

Les bons de souscription d’actions (BSA) et les bons de souscription de parts de créateurs d’entreprise (BSPCE) permettent à leurs détenteurs d’acheter des actions à un prix prédéfini. Il s’agit d’un financement alternatif pour l’entreprise, car cette dernière peut s’offrir les services d’experts en limitant les sorties de trésorerie. Ces experts acceptent une moindre rémunération en échange d’un potentiel de gains futurs plus conséquent. Mais attention ! Ces produits sont complexes et nécessitent, dans un monde idéal, une transparence totale sur la structure actionnariale existante. La technicité et l’opacité de l’exercice réduisent d’autant leur attrait et en freine l’usage.

Vous, si vous utilisez ces outils, vous sentez-vous apte à les présenter de manière simple et limpide ? … rassurez-vous, l’exercice n’est pas maîtrisé de tous.

Depuis 2024, pour renforcer l’attractivité des BSPCE, il est possible d’accorder une décote sur le prix d’exercice des BSPCE, dès lors qu’elle est justifiable et justifiée. Plusieurs raisons expliquent cette récente évolution :

Comme pour les instruments hybrides évoqués précédemment, l’effet dilutif des bons de souscription est pris en compte dans la section vision diluée de la table de capitalisation. Leur impact doit être évalué attentivement.

Conclusion

Que ce soit par des financements dilutifs, non dilutifs, hybrides ou via des bons de souscription, les startups disposent d’un large éventail de solutions de financement. Il en existe d’autres (ex: amélioration du BFR, affacturage). Les financiers et les juristes sont plus créatifs qu’on ne le pense !

Le dirigeant doit jouer avec ces instruments tels un chef d’orchestre et veiller au tempo. Cependant, les interactions entre ces mécanismes peuvent vite devenir difficiles à appréhender. Sans outil approprié, il est délicat, voire impossible, d’estimer précisément les effets croisés de ces différentes stratégies de financement. La plateforme Logo Alqui Alqui se propose justement d’apporter clarté et exhaustivité dans l’analyse, permettant ainsi aux entrepreneurs et investisseurs de prendre les décisions les plus éclairées possibles.

Enfin, un point conjoncturel : dans un contexte économique incertain, les investisseurs adoptent une posture plus attentiste, ce qui contribue à allonger les délais d’obtention de financements. Ce seul facteur a provoqué une hausse des multiples de liquidation préférentielle mais aussi, malheureusement, une augmentation des procédures collectives. Un paramètre à garder en tête !


Points clés à retenir

  • Chaque type de financement (dilutif, non dilutif, hybride, différé) a un impact spécifique sur la structure capitalistique et la gouvernance.
  • Le timing est crucial : lever au bon moment permet de maximiser sa valorisation et de préserver sa capacité de négociation.
  • Les instruments hybrides (BSA-AIR, OC) offrent de la flexibilité mais demandent une bonne anticipation de leur effet dilutif.
  • Une gestion proactive de la cap table est indispensable pour éviter les mauvaises surprises… et c’est précisément ce que permet Logo Alqui Alqui.

Glossaire

Action participative
Action donnant droit à la fois au remboursement préférentiel et à une part du solde réparti entre tous les actionnaires ordinaires.
BSA-AIR
Bon de souscription utilisé pour lever des fonds sans pour autant avoir à figer une valeur des capitaux propres durant les négociations. En contrepartie de ce financement rapide, une décote sur le prix de conversion est garantie à l’investisseur.
BSA ratchet
Mécanisme défensif associé à une action qui permet à un investisseur de recevoir des actions supplémentaires (via des BSA) si une levée future se fait à une valorisation plus basse que celle à laquelle il a investi.
Bootstrapping
Méthode de développement basé sur l’autofinancement. Seules les ressources financières internes sont monopolisées, excluant donc toute augmentation de capital via des actionnaires externes.
Carve-out
Part du capital distribuée à une partie (souvent le management) ou la totalité des actionnaires et ce avant même que ne soient payées les liquidations préférentielles.
Effet dilutif
Baisse du pourcentage de détention d’un actionnaire lorsque de nouvelles actions sont émises.
Liquidation préférentielle
Clause contractuelle permettant à un investisseur d’être remboursé (voire plus si le multiple est supérieur à 1x) avant les détenteurs d’actions ordinaires.
Obligation convertible
Prêt qui peut faire l’objet d’une conversion en titres au lieu d’être remboursé en numéraire. La décision de convertir est souvent à l’appréciation du prêteur. On parle de dette mezzanine car elle contient à la fois des caractéristiques de dette et d’equity.
Valuation cap
Plafond de valorisation utilisé pour convertir un instrument comme un BSA-AIR ou une obligation convertible. Il permet à l’investisseur d’obtenir un meilleur prix si la valorisation de marché des capitaux propres au moment de la conversion dépasse ce montant.
Valuation floor
Seuil minimum de valorisation utilisé pour convertir un instrument comme un BSA-AIR ou une obligation convertible. Il garantit à la startup une valorisation plancher, même si la valorisation réelle est plus basse.